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La mission Tumba

Je vais vous parler de la Mission Catholique Tumba appelée aussi Tumba Mission. Tumba mission est située à moins de 4 Km de la Nationale N°1 dans le tronçon comprise entre la bifurcation de Kwilu-Ngongo et la cité de Lukala. Tumba a été à la une le 12 décembre 2021, jour de clôture des festivités marquant le centenaire de son école, l’Institut Tumba Kunda Dia Zayi (ITUKUZA). L’actuel chef de l’Etat, ancien élève de cette école était venu physiquement pour commémorer et clôturer les festivités du centenaire.

La Mission Catholique Tumba a été créée vers les années 1896 par les Pères Rédemptoristes dans la vague de la construction de la ligne de Chemin de fer Matadi-Kinshasa. Elle servait d’aumônerie des rails aux chrétiens qui construisaient la ligne de chemin de fer. Etant situé au KM 199 ; c’était le juste milieu entre Matadi et Kinshasa et était la première station (Gare) importante de chemin de fer inaugurée par Monsieur Albert Thys en personne, le 1er mai 1896.

Les écoles primaires et secondaire sont implantées ou bâties sur des terres de 3 clans voisins ( Mbamba, Ntumba Mvemba, Nsaku ). Les religieux furent installés à cet endroit, car le lieu-dit Tumba fut un lieu de marché pour les chefferies de Mbamba-Kikola, de Luvituku, de Tungwa et Nienge. A la création du secteur de Moerbeke ( actuel Kwilu-Ngongo) en 1933 qui englobera plusieurs chefferies des Bandibu allant de Luvituku, Kitobola, de Nienge, de Tumba Vata, de Ntemo, de Nsamba-Ngongo, Mbuka, Mbamba, cité Lubaka de Kwilu-Ngongo, Kibentele jusqu’à Kimpangu ( frontière avec l’Angola). TUMBA mission a vu sa population augmenter entre 1898 et 1933. On estime, entre 10 000 à 14000 habitants la population indigènes ( congolais) et Européenne .

Cette population comprenait des congolais ( autochtones), des travailleurs ouest africains( sénégalais, togolais, sierra léonais, nigérians, béninois) ,des antillais, cap-verdiens. Pour la population Européenne ( estimé à plus de 500 ): Belges( flamands), Portugais, Grecs.Les portugais vivant à Thysville, avaient des boutiques ou magasins à Tumba, à Kitobola, à Nkolo à Moerbeke et Lukala. On en entendait parler des familles Carlos , de Nunes, de Freitas, de Mendes, de Maldonado, de Nogueira, ,de Figueredo etc…De la présence de cette gare ; Tumba était devenu un centre commercial, administratif et religieux.

Les voyageurs en provenance de Matadi ou de Kinshasa y passaient la nuit parce que le voyage s’effectué en deux jours (deux étapes) ; le premier jour Matadi-Tumba et le deuxième jour, Tumba-Kinshasa. En sus des activités liées au chemin de fer et à l’administration coloniale ; Tumba était un centre de rayonnement intellectuel et culturel ; il y existait deux imprimeries ; la première était pour la mission catholique Tumba où était imprimé des travaux de recherches sur la langue Kikongo et Royaume Kongo ; des livres de catéchèses ; etc…et la deuxième imprimerie appartenait aux Frères des Ecoles Chrétiennes qui s’était implanté à Tumba en 1921 ; tous les manuels scolaires de l’époque étaient imprimés dans cette imprimerie qui portait le nom de Signei Fidei. Beaucoup des travaux des recherches de Pères J-F Cuvelier et Joseph De Munck sont sortis de ces imprimeries.

Il y existait un petit séminaire , un noviciat ; une petite brasserie et une école normale.Le Changement de tracé de la ligne de chemin de fer motivée entre autre par la création de la société sucrière de Kwilu-Ngongo a privé Tumba de sa gare et toutes les activités liées au chemin de fer avait été transféré à Kwilu-Ngongo ; les commerçants Portugais sont partis s’installer à Kwilu-Ngongo… et Tumba est resté un centre de rayonnement intellectuel ; culturel et religieux sans oublié son internat…Aujourd’hui, Tumba n’est plus que l’ombre de sa grandeur d’antan, bien qu’il a été électrifié il y a quelques années ; Tumba souffre de vétusté, tous les bâtiments sont plus que centenaire ; les imprimeries, le noviciat, le petit séminaire n’existent plus et avec les problèmes de manque de maintenance et d’entretien qui « nous » caractérise le pire est à redouter. Le circuit des distributions d’eau avec le château d’eau laissé par les fondateurs de Tumba ne fonctionne plus, les habitants de Tumba doivent aller puiser l’eau dans la rivière(Lombesa) et pour l’eau de boisson ; ils doivent aller la chercher à la source…Les frères des écoles chrétiennes ont un forage qui sert uniquement à leurs besoins et à ceux de l’internat.

L’internat de Tumba qui était jadis une référence n’en est plus un et peine à avoir 80 internes et dire que dans les années de sa gloire il y avait chaque année entre 300 et 700 internes. Les élevages (de bœufs et de porcs) et autres activités agricoles laissés par les missionnaires et frères qui jadis faisaient la fierté de Tumba ne sont plus pratiqués…Quelques manuels et livres religieux imprimés à la M.C. de Tumba à l’heure de son apogée :-Cuvelier J.-F., Manuel de langue française, vocabulaire, grammaire, exercices,phrases usuelles. Malongi ma fransais, Tumba, M.C., 1914, in 12 , 144 p.-Cuvelier J.-F., Manuel de lecture élémentaire, Mission catholique Tumba, 1914 ,46p., exemplaire KADOC BKDC KBRBI 5473-Cuvelier, Jean-Francois, Malongi mantete ma tanga ye soneka [Premières leçons d’écriture et de lecture] Mission catholique, Tumba, Ed. Préparatoire, 16 p. KADOCBKDC KBRBI 5542-Cuvelier, Jean-Francis], Malongi mantete ma tanga yo soneka, [Premières leçons d’écriture et de lecture] ,Van Lantschoot Jette, sans pagination, 1912, exemplaireKADOC BKDC KBRBI 5541-De Munck, Jef, Kinkulu kia nsi eto a Kongo, [Histoire de notre pays] Mission Catholique Tumba, 1956, 79 p., ill., exemplaire KADOC BKDC KB28607Repères historiquesHEINTZ (Joseph), Préfet apostolique de Matadi, missionnaire rédemptoriste (Bastogne, 12,1.1865—Kinkanda, 29.8.1940). Après ses humanités au petit séminaire de sa ville natale, il entra chez les Rédemptoristes, émit les vœux de religion en 1883, fit ses études de philosophie et théologie au scolasticat de Beauplateau (Tillet) et y reçut l’ordination sacerdotale en 1891. Il fut attaché ensuite à la résidence de Bruxelles, puis à celle de Liège, où il fut directeur de l’association de la SainteFamille. En 1902, il fut désigné pour le Congo où ses confrères étaient établis depuis 1899. Ils desservaient alors les missions de Matadi, Tumba, Kionzo, Kimpese et se chargeaient de l’aumônerie de l’hôpital de Kinkanda. Ce dernier poste fut confié au P. Heintz à son arrivée dans la colonie le 27 juin 1902. Au mois de janvier 1903 il fut envoyé à Kimpese. Là encore il ne fit que passer ; au mois d’août de la même année il fut attaché à Tumba. Tumba était alors un chef-lieu de district avec les bureaux de l’administration, une garnison, une centaine d’Européens et environ 1500 indigènes.

Tumba mission © Guy-Patrick Makanda
Tumba mission

De la ligne du chemin de fer de Matadi-Léopoldville, les missionnaires rayonnaient facilement dans les régions environnantes. Le P. Heintz eut ainsi l’occasion de faire de nombreux voyages d’exploration et parvint à établir plusieurs postes secondaires. Ses efforts combinés avec ceux des PP. Van de Plas, Van Durme et Simpelare firent dès 1904 de Tumba un centre d’évangélisation dont l’influence s’étendait sur la presque totalité de la région des cataractes. Dans une de ces randonnées apostoliques, le P. Heintz parvint à abattre un léopard qui jetait l’épouvante dans la région et avait déjà tué trois enfants. Cet exploit cynégétique accrut singulièrement son prestige auprès de la population.

Il n’avait pas été désigné seulement pour le service religieux de la station. Tumba possédait une école de catéchistes, fondée par le P. Simpelare, et le P. Heintz eut à la diriger. L’enseignement devint dès lors son œuvre de prédilection et le restera tout le long de sa carrière coloniale. On pourra écrire plus tard que le magnifique épanouissement d’établissements d’instruction de la mission, qui comptera après quelques années 459 écoles primaires, 9 écoles professionnelles, 6 écoles normales, eut son point de départ dans les pauvres chimbecks de Tumba où le P. Heintz s’épongeait devant quelques gamins qui allaient devenir comme catéchistes de précieux auxiliaires des Pères. Il ne put cependant pas longtemps rester à Tumba . Depuis 1903, les maisons des Rédemptoristes au Congo étaient devenues assez importantes pour constituer une vice-province, régie par un Visiteur permanent. Le P. Achille Simpelare avait été désigné le 2 juillet 1903 pour cette charge, mais il succomba à la tâche dès le 25 juillet de l’année suivante.

Le P. Heintz fut appelé à lui succéder et dut aller s’établir à Matadi, résidence du Visiteur. Sous sa direction la mission prit de grands développements. Il eut un mérite spécial dans l’organisation de l’enseignement. Déjà après la première réunion plénière des chefs de mission, à laquelle il assiste, à Léopoldville, en 1907, il fit adopter à Tumba le programme dressé à cette occasion. L’école fut divisée en une section supérieure et une section inférieure d’après les capacités des enfants. Organisation encore bien embryonnaire mais qui marqua un progrès sérieux. En 1921, il eut l’heureuse idée d’appeler à Tumba les Frères des Écoles chrétiennes pour fonder une école normale, Les locaux des premiers temps firent place à des constructions modernes, spacieuses et confortables.

L’école de Tumba fut la première à organiser un programme complet pour les instituteurs congolais. Les premiers diplômés en sortirent en 1924. Depuis, en 28 promotions, 850 instituteurs diplômés y ont été formés, A côté d’eux 1500 autres anciens élèves de Tumba ont trouvé une place dans l’administration et les diverses compagnies. En 1929, Mgr Heintz, qui avait atteint ses 64 ans, dont 25 passés dans la colonie, sollicita la faveur d’être déchargé de la préfecture. On fit droit à sa demande et il fut remplacé par le R. P. Jean Cuvelier qui allait devenir le premier vicaire apostolique de Matadi. Le P. Heintz continua à résider à Tumba jusqu’à ce que, en 1935, il revint en Belgique pour restaurer sa santé fortement ébranlée.

Cependant, la nostalgie du pays noir le reprit. Malgré la maladie, malgré ses 72 ans, il voulut rentrer au Congo désireux d’y rendre encore à ses confrères les services que son âge et ses forces au déclin lui permettraient. En 1940 il dût être transporté à l’hôpital de Kinkanda où il mourut le 29 août. Le 1 e r juin 1952 un buste du vénéré défunt, œuvre de l’artiste André Lufua, fut inauguré avec grande solennité à l’école des Frères de Tumba en présence de centaines d’anciens élèves de l’établissement.